Le 14 janvier 2022 dans le cadre du Forum Gaïdar, l’Université Franco-Russe a organisé une discussion intitulée «L’Université Franco-Russe: priorités pour l’année 2022 - nouvelles opportunités» réunissant des experts russes et français dans le domaine de la science et de l’enseignement supérieur. Du côté russe à la discussion ont participé le recteur de l’Université Nationale de Recherche en Technologies Informatique, Mécanique et Optique (ITMO) Vladimir Vassiliev, le recteur de L’Université Nationale de Recherche Nucléaire «MEPhI» Vladimir Chevtchenko, le recteur de RANEPA Vladimir Mau, le président de l’Université Russe de l’amitié des peuples (RUDN) Vladimir Filippov. Du côté français: Conseiller pour la science et la technologie à l’Ambassade de France en Russie Abdo Malac, président d’Aix-Marseille Université Eric Berton, Directrice Générale de NEOMA Business school Delphine Manceau, Directeur Général Adjoint de SKEMA Business school Patrice Houdayer. La session a été animée par le recteur de l’Académie russe du commerce international (RFTA) Serguey Sinelnikov-Mourylev et la Vice-présidente "Rayonnement et relations internationales" de l’Université Grenoble Alpes Karine Samuel.
Les participants à la discussion des experts ont été invités à répondre à plusieurs questions sur les nouvelles opportunités qui s’offrent à eux, ainsi que sur les priorités des universités en réseau pour la nouvelle année. Comment les experts, voient-ils le développement des universités en réseau? Quelles sont les spécificités de ce développement dans le nouveau contexte? En répondant à cette question, le Conseiller pour la science et la technologie à l’Ambassade de France en Russie Abdo Malac a souligné que les universités en réseau étaient devenues le moteur de la coopération franco-russe basé sur les solutions innovantes. Tous les participants contribuent au développement des écosystèmes dans le domaine de l’enseignement et de la recherche dans le but d’augmenter leur efficacité. La pandémie a eu un impact très fort sur le domaine de l’enseignement et de la science. Il a fallu se mettre sur des rails informatiques de manière urgente ce qui implique une restructuration psychologique. Ce sont probablement les étudiants qui ont plus de mal dans ce contexte: l’écart entre la qualité de l’enseignement s’agrandit à l’étape préuniversitaire. Il s’est avéré que les étudiants n’ont pas tous le même accès aux technologies digitales. D’après l’avis de l’expert, cette situation perdurera jusqu’en 2025-2027 et pourra amener à la diminution de l’accessibilité de l’enseignement supérieur. Abdo Malac considère que malgré la création de plateformes virtuelles, il ne s’agit que d’une solution partielle. Ce modèle ne pourra pas s’enraciner puisque l’enseignement à l’étranger représente le moment clef dans la vie estudiantine. Les universités sont obligées de continuer le travail commun afin de surmonter les difficultés actuelles. L’étude européenne consacrée aux universités en réseau montre que 80% des établissements de l’enseignement supérieur ont partagé leur inventions et résultats d’essais, 65% ont transmis leurs enseignements MOOC et cours en ligne pour l’utilisation de partenaires, 85% ont mis en place des programmes très avancés consacrés à la digitalisation de leurs campus. Ainsi, les universités faisant partie du réseau ont permis à leurs étudiants de mieux répondre aux défis de la pandémie. Chaque crise nous offre de nouvelles opportunités. Et dans ce contexte, l’université en réseau est extrêmement importante.
L’importance de la coopération entre les universités qui ne fera que s’amplifier dans l’avenir a été également soulignée par le président de l’Université russe de l’amitié des peuples Vladimir Filippov. Il est persuadé que la coopération ciblée au sein de l’Université Franco-Russe doit être organisée compte tenu de l’expérience personnelle de l’ensemble des partenaires dans de différentes structures en réseaux. Il s’agit de l’augmentation des opportunités individuelles des étudiants, de l’aide de la part des universités plus fortes aux universités plus faibles qui n’ont pas les moyens suffisants, il s’agit également de la création de programmes d’enseignement exclusifs. Le dernier point est à réaliser dans le cadre de l’UFR étant donné le niveau individuel élevé de chacun des participants. Il est proposé de créer au sein d’un consortium à deux ou trois participants des programmes d’enseignement exclusifs qu’une université toute seule aurait du mal à mettre en place. Vladimir Filippov est persuadé qu’à l’aide des technologies proposées en ligne, les étudiants pourront acquérir de nouvelles connaissances dans des enseignements à leur choix qui pourront être pris en compte dans leurs universités d’origine faisant partie d’un programme d’enseignement validé. Pour ceci il a proposé de fixer les matières uniques qui intéresseraient les parties et que l’UFR pourrait proposer à ses étudiants. Ensuite, il faudra préciser si nous décidons de reconnaître la réussite d'une telle formation sur la base de confiance ou si nous développons un mécanisme unifié de reconnaissance des résultats de ces formations pour la prise en compte automatique des crédits correspondants dans nos programmes éducatifs. Enfin, il faut valider les programmes éducatifs précis pour lesquels ces formations pourront être prises en compte. Compte tenu de ce qui précède, le président de l’Université RUDN a proposé de déterminer les objectifs et les étapes de leur réalisation sous forme d’une feuille de route pour l’Université Franco-Russe lors des futures Conseils de l’UFR.
Le Directeur Général adjoint de SKEMA Business school Patrice Houdayer a souligné que grâce au fonctionnement du réseau, la coopération universitaire s’était beaucoup renforcée ces dernières années. D’après lui, un modèle d’enseignement hybride pourrait être plus efficace dans le cadre de l’Université Franco-Russe.
La Directrice Générale de NEOMA Business school Delphine Manceau a partagé son expérience de création d’un campus virtuel permettant de continuer l’apprentissage depuis n’importe quel coin du monde. Grace à cet outil, les étudiants en France ont pu travailler en étroite collaboration avec des étudiants chinois. Le campus virtuel continuera à se développer, sans doute, même après la pandémie. En même temps une plate-forme appelée «Ensemble, c’est mieux» a également été lancée pour les partenaires. Selon elle, le secteur de l'éducation évolue et le format d’enseignement à distance restera également dans l’avenir.
Le sujet a été poursuivi par la Vice-présidente "Rayonnement et relations internationales" de l’Université Grenoble Alpes, Karine Samuel. Elle estime que la tendance à la création des universités en réseau s'est vraiment développée ces dernières années. A ce jour en Europe seule fonctionnent 41 universités membres du réseau. L'Université Grenoble Alpes est membre de quelques dizaines de tels réseaux, y compris transnationaux. Il existe également des réseaux de partenaires qui regroupent des business schools, des écoles techniques et d'autres. Mais de nouvelles questions se posent dans ce contexte: quels sont les critères pour choisir le réseau auquel un établissement d’enseignement supérieur à l’intérêt d’adhérer et quelles ressources y investir? Au cours des deux dernières années, y compris en raison de la pandémie, le développement de nouveaux produits éducatifs adaptés au monde numérique s'est accéléré.
Comment ces produits sont évalués par les experts, comment se déroulera leur développement?
D’après le recteur de l’Université Nationale de Recherche Nucléaire «MEPhI» Vladimir Shevchenko, la pandémie a modifié l’architecture de la concurrence entre les universités, car les étudiants peuvent désormais choisir où obtenir une formation en ligne. A ce jour, la compétitivité des universités consiste à composer des programmes éducatifs plus attrayants et à impliquer des professeurs renommés. Il ne s’agit plus tout simplement d’attirer à l’université de futurs étudiants. Une nouvelle question se met à l'ordre du jour: comment aider les étudiants à naviguer parmi toutes ces opportunités pour faire le bon choix? Ainsi, augmenterait l’importance des tuteurs et la formation linguistique générale deviendrait extrêmement pertinente. Actuellement l’Université Nationale de Recherche Nucléaire ensemble avec l’Aix-Marseille Université prépare un programme commun consacré à la fusion thermonucléaire. En même temps, les partenaires partent du principe qu'il est maintenant nécessaire de proposer un produit de la plus haute qualité dans le domaine de l'éducation. Ce produit servira d’une parfaite illustration de l’université qui l'a créé, et contribuera à son apparition dans de différents classements.
Le recteur de l'Université ITMO, Vladimir Vassiliev, croit que dans le futur, les universités passeront à la formation hybride qui comprendra les technologies d’Internet, l'intelligence artificielle et Big data. Les universités commencent à mettre en place des parcours éducatifs individuels pour leurs étudiants. Ces parcours doivent devenir flexibles au maximum dans le processus d'éducation. Et c’est à ce moment que les universités devraient accorder une attention particulière à la motivation des étudiants. Le recteur a proposé d’aborder la question de la motivation des étudiants dans le cadre de l’Université Franco-Russe ensemble avec les partenaires français et de travailler dans ce sens. Comment les participants comprennent-ils l’approche humaine dans l'enseignement universitaire? Comment le développement des réseaux universitaires, en particulier de l’UFR, contribuera à cette tendance? Le président d'Aix-Marseille Université, Eric Berton, a souligné les aspects positifs des nouvelles technologies éducatives utilisées lors de la création des universités en réseau, ainsi que lors de la préparation des MOOC. La numérisation et la formation à distance seraient devenues une bonne solution au début de notre nouvelle époque. Cependant il croit qu’il est fondamental de maintenir les échanges entre les humains dans l'enseignement supérieur. Le seul moyen d’immerger dans une autre culture c’est d’aller dans un autre pays. Les nouvelles technologies sont certainement utiles dans certaines matières, surtout pendant les premières années d'études. Mais ensuite, il faut chercher à créer un contact réel, et en premier lieu, dans l’environnement scientifique. A part cela, la reconnaissance mutuelle des diplômes devient de plus en plus importante, ce qui augmente l'ouverture au monde extérieur. D'autant plus que le mode de vie nomade des étudiants se renforcera dans le futur. C'est normal que les jeunes veuillent prendre le meilleur dans différentes universités. C’est la réalité de demain. Dans ce contexte, il devient extrêmement important pour les universités d’encourager par tous les moyens l’enrichissement interculturel des jeunes.
En conclusion de la discussion, le recteur de RANEPA, Vladimir Mau, a précisé que la forme hybride de l'enseignement était mieux adaptée à l'individualisation du processus de la formation, et que la prochaine étape pourrait devenir la création de groupes de recherche conjoints et la formation d'une communauté de meilleurs professeurs qui donneraient des cours dans le cadre de l’UFR. A ce jour, les universités ont une marge de manœuvre pour expérimenter. Au cours des deux dernières années nous avons, sans doutes, fait une grand pas en avant dans le domaine de la numérisation, mais c’est son utilisation dans l’avenir qui montrera comment tout ça va fonctionner. Ce que nous avons encore à comprendre et à réaliser est beaucoup plus compliqué par rapport à ce que nous avons déjà mis en place.
Discussion d’experts du Forum Gaidar 2022 "L’Université Franco-Russe: priorités pour l’année 2022 - nouvelles opportunités"
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